Et si un ordinateur pouvait décoder dans le cerveau les mots auxquels vous pensez ?

conseil-de-sante-blogspot.comC’est ce que laisse apercevoir une étude germano-américaine menée par l'Institut de technologie de Karlsruhe (Allemagne) associé à plusieurs centres de recherche d’Albany (État de New York, États-Unis). Les chercheurs ont, en effet, réussi à interpréter le langage naturel de patients en train de lire, d’après les ondes cérébrales émises par leur cortex ! Ils ont nommé leur système "Brain-to-Text". Selon la définition de l’Inserm, une interface cerveau-machine désigne "un système de cordon directe entre un cerveau et un ordinateur, permettant à un individu de communiquer avec son environnement sans passer par l’action des nerfs périphériques et des muscles".

Des grilles d'électrodes déposées en plusieurs endroits du cerveau

Voici précisément ce qu’ont testé sept patients épileptiques du Centre médical d’Albany alors qu’on leur avait implanté des électrodes dans le crâne. Plus précisément, des grilles d’électrodes ont été déposées en plusieurs endroits de leur cerveau pour identifier les foyers épileptiques à traiter. Ceux ayant des électrodes situées à la surface du cortex du lobe temporal gauche — aire cérébrale de la lecture — ont attiré l’attention des scientifiques. Ces patients-là ont accepté de se soumettre à une expérience. Ils ont lu à haute voix des textes d’une quarantaine de phrases défilant sur un écran. Pendant ce temps-là, l’onde acoustique de leur voix ainsi que l’activité électrique du cerveau étaient enregistrées simultanément.

Notre prochaine étape sera de décoder les mots lorsque les gens les imaginent seulement"


Cette action a permis à l’ordinateur d’identifier les signaux d’activité électrique du cortex produits en même temps que les sons correspondant aux mots et aux phrases. Une fois cette phase d'apprentissage de la machine achevée, "nous avons réussi à décoder des mots entiers et même des phrases entières d’après l’électro-cortigraphie seule", raconte un des auteurs de l'étude Christian Herff de l'Institut technologique de Karlshuhe. Taux d’erreur : 25 %. "Notre prochaine étape, en plus d’améliorer la précision, sera d’essayer de décoder les mots lorsque les gens les imaginent seulement (sans les lire)."

Des perspectives contre le locked-in syndrome

Ce qui ouvrirait de grandes perspectives, notamment pour venir en aide aux patients atteints du locked-in syndrome (LIS), cette terrible maladie neurologique qui paralyse entièrement le corps (excepté les yeux) mais préserve une conscience normale. "Si nous étendons notre méthode au discours imaginé, alors les patients LIS pourraient s’imaginer en train de parler et donc communiquer de nouveau avec leur environnement à travers notre système."

Quentin Noirhomme, chercheur à l’université de Maastricht (Pays-Bas) et celle de Liège (Belgique), spécialiste des interfaces cerveau-machine pour les patients, salue la performance. "Le principal avantage de la technique présentée ici, c'est la qualité du signal." En effet, en enregistrant les potentiels électriques induits directement par l’activité des neurones ils obtiennent un excellente résolution temporelle de l’ordre de la milliseconde. "Et la proximité de la source réduit considérablement le bruit enregistré." La principale limite de l’étude, selon lui, porte sur le nombre de mots lus, de 10 à 100, une infime partie du dictionnaire. Mais elle ouvre la voie à une communication basique (oui, non…) qui serait déjà exceptionnelle. Le chercheur note cependant que le principal inconvénient de la technique est qu'elle invasive, ce qui induit un certain nombre de risques. "Cette technique ne peut être envisagée que pour une utilisation à long terme chez des patients qui ne pourront récupérer le langage autrement. Les patients LIS dont la réhabilitation ne progresserait plus seraient en effet d'excellents candidats."

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